lundi, septembre 8, 2025
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𝐋𝐚 𝐫𝐞́𝐮𝐧𝐢𝐚𝐧 𝐝𝐮 𝐋𝐚𝐜 : 𝐥𝐞 𝐣𝐚𝐮𝐫 𝐚𝐮̀ 𝐥𝐞𝐬 𝐊𝐢𝐧𝐢𝐬𝐭𝐫𝐞𝐬 𝐝𝐮 𝐍𝐚𝐫𝐝 𝐬𝐚𝐧𝐠𝐞̀𝐫𝐞𝐧𝐭 𝐚̀ 𝐫𝐞𝐧𝐯𝐞𝐫𝐬𝐞𝐫 𝐥𝐞 𝐠𝐚𝐮𝐯𝐞𝐫𝐧𝐞𝐊𝐞𝐧𝐭

Le samedi 18 juin 1983.

Au Palais d’Etoudi, le président Paul Biya reçoit son Premier ministre, Bello Bouba Maïgari.

La rencontre se déroule dans une atmosphÚre de confiance apparente : les deux hommes échangent longuement sur les affaires de l’État, puis se séparent sans heurts. Rien ne laissait présager la tempête qui s’annonçait.

À peine deux heures plus tard, à l’édition de la mi-journée de la radio nationale, Bello Bouba apprend, stupéfait, qu’un remaniement ministériel vient d’être annoncé.

Le chef de l’État n’avait rien laissé paraître au cours de leur entretien du matin. La surprise est d’autant plus grande que ce réaménagement du gouvernement intervient à peine trois mois aprÚs le précédent.

Le Premier ministre, Bello Bouba Maïgari, qui a tenu un briefing avec Paul Biya jusqu’à midi, est donc informé par la radio de ce nouveau gouvernement dont il est supposé être le chef.

Mais surtout, ce coup de balai frappe les figures emblématiques du régime Ahidjo :

* Sadou Daoudou, ministre des Forces armées pendant prÚs de vingt ans, est écarté du poste stratégique de secrétaire général de la Présidence.

* Samuel Eboua, longtemps bras droit d’Ahidjo et considéré comme son successeur officieux, perd son portefeuille de l’Agriculture.

* Ayissi Mvodo, tout-puissant ministre de l’Administration territoriale et pilier de l’ancien régime dans le Centre-Sud, est lui aussi remercié.

* Guillaume Bwele quitte l’Information et la Culture, tandis qu’Athanase Eteme Oloa est évincé de la Santé.

Le symbole est cruel : Sadou Daoudou, qui avait passé toute la matinée aux cÎtés du président, découvre sa disgrâce quelques minutes seulement aprÚs avoir regagné son domicile, par la voix de la radio.

Pour Bello Bouba, cette mise à l’écart brutale traduit un manque total de confiance et de considération. Sa dignité, pense-t-il, lui commande de démissionner. D’autres ministres, qui se sentent également désavoués, envisagent de l’imiter.

Jusqu’alors, les arbitrages gouvernementaux se faisaient encore dans l’ombre, entre Paul Biya et son prédécesseur Ahmadou Ahidjo. Mais l’ancien président, retiré du pouvoir, refuse de rester passif.

Il convoque aussitÃŽt à sa résidence du Lac, à Yaoundé, tous les ministres originaires du Nord-Cameroun. À cette réunion cruciale assiste également Ibrahim Mbombo Njoya, fils du sultan des Bamoun et proche d’Ahidjo.

L’ancien chef de l’État ne cache pas sa colÚre. Pour lui, la réponse doit être radicale : provoquer une crise institutionnelle en obtenant la démission collective des ministres du Nord. Ce geste, pense-t-il, pourrait suffire à faire chuter le gouvernement Biya.

Mais l’unanimité n’est pas au rendez-vous. Seul Maïkano Abdoulaye, ministre de la Défense, adhÚre à cette stratégie. Bello Bouba, quant à lui, est tenté par la démission, mais pour une raison plus personnelle : la maniÚre abrupte dont il a été désavoué par le président. Finalement, le projet échoue.

La solidarité nordiste se fissure et l’histoire retiendra cet épisode sous le nom de « Réunion du Lac » : le jour où une fronde ministérielle manqua de faire vaciller le pouvoir naissant de Paul Biya.

Pour aller plus loin; lisez les années Biya de Haman Mana

La terre est sale ! Si Ú ne mvit ! Ngo Bagdeu !

Arol KETCH – 07.09.2025

Rat des archives

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