Afrique

𝐃𝐣𝐞𝐮𝐀𝐚𝐊 𝐓𝐜𝐡𝐚𝐊𝐞𝐧𝐢 – 𝐏𝐢𝐚𝐧𝐧𝐢𝐞𝐫 𝐝𝐞 𝐥’𝐢𝐧𝐭𝐞𝐥𝐥𝐢𝐠𝐞𝐧𝐜𝐞 𝐚𝐫𝐭𝐢𝐟𝐢𝐜𝐢𝐞𝐥𝐥𝐞 𝐞𝐭 𝐝𝐞 𝐥’𝐢𝐧𝐧𝐚𝐯𝐚𝐭𝐢𝐚𝐧 𝐭𝐞𝐜𝐡𝐧𝐚𝐥𝐚𝐠𝐢𝐪𝐮𝐞 𝐚𝐮 𝐂𝐚𝐊𝐞𝐫𝐚𝐮𝐧

𝐃𝐣𝐞𝐮𝐀𝐚𝐊 𝐓𝐜𝐡𝐚𝐊𝐞𝐧𝐢 – 𝐏𝐢𝐚𝐧𝐧𝐢𝐞𝐫 𝐝𝐞 𝐥’𝐢𝐧𝐭𝐞𝐥𝐥𝐢𝐠𝐞𝐧𝐜𝐞 𝐚𝐫𝐭𝐢𝐟𝐢𝐜𝐢𝐞𝐥𝐥𝐞 𝐞𝐭 𝐝𝐞 𝐥’𝐢𝐧𝐧𝐚𝐯𝐚𝐭𝐢𝐚𝐧 𝐭𝐞𝐜𝐡𝐧𝐚𝐥𝐚𝐠𝐢𝐪𝐮𝐞 𝐚𝐮 𝐂𝐚𝐊𝐞𝐫𝐚𝐮𝐧

DÚs le milieu des années 1980, Djeukam Tchameni fonde une entreprise résolument en avance sur son temps : Intelligence Artificielle Inc., plus connue sous le nom d’Intelar.

Oui, à une époque où le monde parle encore à peine d’ordinateurs personnels, un jeune Camerounais ose déjà s’approprier un concept que beaucoup ne découvrent qu’aujourd’hui: l’intelligence artificielle.

Intelar une start-up avant l’heure, un véritable brain trust pluridisciplinaire, conçu pour permettre à l’Afrique de rivaliser avec les géants mondiaux de la technologie. Ses fondateurs ont tous moins de 30 ans, formés en Europe, aux États-Unis ou en Russie. Leur seul tort : avoir rêvé trop tÃŽt, dans un pays qui n’y était pas prêt.

L’aventure commence en 1985, à la fin de ses études aux États-Unis. DiplÃŽmé d’un MBA de l’University of Houston (Texas), Djeukam rentre au Cameroun animé par une idée claire : briser la dépendance intellectuelle et technologique de l’Afrique.

À seulement 24 ans, il est recruté par Pecten, une multinationale américaine du secteur pétrolier. Mais trÚs vite, il constate que les pratiques de l’entreprise heurtent profondément ses convictions patriotiques. Contre l’avis général, il démissionne. Seule son épouse, une Afro-américaine, l’encourage à suivre sa voie.

Il fonde alors Intelar. D’abord, de modestes contrats : informatisation, conception de logiciels. Puis une idée audacieuse s’impose à lui concevoir un ordinateur africain, pensé pour les réalités locales : chaleur, poussiÚre, humidité.

L’idée devient une obsession.

Il rassemble une équipe de jeunes ingénieurs camerounais. Ensemble, ils mettent au point un prototype baptisé RamsÚs Ier, en hommage à l’Égypte antique, berceau de la science africaine. En 1986, l’ordinateur est présenté lors d’un salon au Palais des CongrÚs de Yaoundé. C’est un choc. Le milieu technologique local est stupéfait.

Le Fogape accorde alors à Intelar un financement de 100 millions de FCFA. L’entreprise prend son envol. Tous les employés sont Camerounais. Tous ont moins de 30 ans. Les machines sont conçues à Douala, les composants fabriqués à Taïwan.

RamsÚs Ier devient le tout premier ordinateur africain. Un exemplaire est même remis au président Paul Biya. En quelques mois, Intelar devient une fierté africaine.

Mais au Cameroun, le succÚs dérange. Malgré cette prouesse historique, Intelar ne reçoit aucune reconnaissance officielle.

Le 4 août 1991 marque le basculement. Une manifestation prévue à Douala Bar est bloquée par les forces de l’ordre. Les manifestants se replient vers le siÚge de Cap Liberté, installé dans les locaux d’Intelar, sur le boulevard de la Liberté à Akwa, prÚs de l’hÃŽtel Le Ndé. Pensant être en sécurité sur un espace privé, ils s’y regroupent pacifiquement.

L’assaut est brutal. Une force mixte : policiers, gendarmes, militaires etc intervient. Tirs à balles réelles. Gaz lacrymogÚnes.

PrÚs de 700 personnes sont arrêtées. Djeukam échappe de peu à la mort.

Le lendemain, les militaires reviennent. Ils défoncent les portes, pillent et saccagent les locaux, emportent le matériel informatique.

Intelar est anéantie.

Cet acte signe la fin brutale d’un rêve technologique africain. Djeukam Tchameni entre dans la clandestinité, puis prend le chemin de l’exil vers le Burkina Faso.

L’histoire d’Intelar reste celle d’un génie étouffé, d’un futur brisé trop tÃŽt, d’une Afrique qui avait rendez-vous avec l’innovation
 et que l’on a empêchée d’y parvenir.

Libérez Djeukam Tchameni et tous les prisonniers politiques.

L’oubli est la ruse du diable !

Arol KETCH – 07.12.20225

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