Les chatouilleuses de Mayotte
Leur arme ? Les doigts. Leur méthode ? La chatouille.. Cela peut faire doucement sourire; et pourtant c’est ainsi que ces femmes ont mené leur lutte pour permettre à Mayotte de sortir du giron comorien et de devenir française.
L’archipel des Comores est un ensemble d’îles de l’océan Indien; constitué principalement de quatre îles : Grande Comore ; Anjouan ; Mohéli et Mayotte. Après avoir été sous protectorat français jusqu’en 1892, l’Archipel des Comores choisit le statut de territoire français d’outre-mer en 1958. En 1961, l’Archipel est doté d’un statut particulier et dirigé par un haut-commissaire représentant la France.
A la suite de l’indépendances de nombreux pays africains dans les années 1960, plusieurs intellectuels Grands – Comoriens pour la plupart; commencent à réclamer l’indépendance. A Mayotte, une bonne partie de la population souhaite rester sous domination française.
Sous la conduite de Zéna M’Déré, plusieurs centaines de femmes organisées en commandos prennent à partie les responsables politiques comoriens en visite à Mayotte pour essayer de convaincre l’île de suivre les velléités indépendantistes des autres îles de l’archipel.
Elles ont pour armes leurs doigts; qu’elles dégainent pour chatouiller leurs adversaires.
Le procédé est le suivant; une dizaine de femmes s’approchent de l’homme politique indépendantiste en visite et commencent à l’interroger. Dès que la personne se met à évoquer l’indépendance, ces femmes le prennent en partie; tirent sa cravate; enlèvent sa chemise et se mettent à le chatouiller avec vigueur aux cris de « Chatouillons-le ! ».
Cela donnait des scènes surréalistes où une vingtaine de femmes chatouillent un homme et le roulent dans la poussière. La personne chatouillée est forcée à s’aligner sur les positions des “chatouilleuses” ou à quitter l’île sous la clameur des « Chatouilleuses ».
Elles ne se contentent pas de chatouilles. La nuit tombée, ces femmes aux doigts redoutables jettent des cailloux sur les toits en tôle des maisons où logent ceux qui prônent l’indépendance, transformant les nuits en concerts de tintements assourdissants, perturbant le sommeil et les ambitions des leaders indépendantistes.
Malgré les assauts répétés des “chatouilleuses”, les indépendantistes continuent leur combat. D’un commun accord et dans un objectif d’indépendance concerté, la France propose un référendum en 1973.
En décembre 1974, à l’issue de ce référendum, les îles d’Anjouan, de la Grande Comore et de Mohéli optent pour l’indépendance à 95% alors que Mayotte préfère à près de 65% demeurer française.
Le 6 juillet 1975, le Président Ahmed Abdallah proclame unilatéralement l’indépendance des Comores. Mayotte refuse d’être intégrée au nouvel Etat et vote pour rester sous administration française. Une fois le combat gagné et le rattachement à la République française obtenu en 1976, les Chatouilleuses sont retournées dans leurs foyers.
L’oubli est la ruse du diable!
La terre est sale! Si è ne mvit ! Ngo Bagde !
Arol KETCH – 11.11.2024
Rat des archives