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Dans lโhistoire de la lutte pour lโindรฉpendance du Cameroun, certains noms rรฉsonnent comme des symboles : Ruben Um Nyobรจ, Fรฉlix Moumiรฉ, Ernest Ouandiรฉ, Ossendรฉ Afana.
Mais derriรจre ces figures emblรฉmatiques bien connues, il y eut aussi des stratรจges de lโombre, des combattants qui prirent les armes pour organiser la rรฉsistance. Parmi eux, Isaac Nyobรจ Pandjock occupe une place particuliรจre.

Un vรฉtรฉran devenu chef de maquis
Ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale, Pandjock appartient ร cette gรฉnรฉration de Camerounais qui ont appris lโart de la guerre dans les rangs de lโarmรฉe franรงaise.
De retour au pays, il met son expรฉrience militaire au service de lโUPC, ce mouvement indรฉpendantiste nรฉ en 1948 et interdit en 1955. Alors que la rรฉpression coloniale pousse les militants dans la clandestinitรฉ, il devient lโun des artisans de la militarisation du combat.
En dรฉcembre 1956, ร lโoccasion de la Confรฉrence de Makaรฏ, lโUPC crรฉe le Comitรฉ national dโorganisation (CNO), vรฉritable รฉtat-major militaire chargรฉ de coordonner la lutte armรฉe. Isaac Nyobรจ Pandjock prendra plus tard la tรชte du CNO.
Le โgรฉnรฉralโ du CNO
Chef militaire reconnu, Pandjock impose une organisation rigoureuse. Le CNO adopte une structure calquรฉe sur celle dโune armรฉe classique : brigades, rรฉgiments et compagnies.
Dans les forรชts dโEsรฉka, dโEdรฉa et de Ngambรฉ, il met en place des camps dโentraรฎnement et supervise des ateliers clandestins oรน lโon fabrique des armes artisanales.
Mais Pandjock est surtout stratรจge dรฉterminรฉ. Conscient que la non-violence prรดnรฉe par Ruben Um Nyobรจ atteint ses limites face ร la brutalitรฉ coloniale, il dรฉfend lโusage de la force.
Le dรฉbat est dโailleurs nourri dans les rangs de lโUPC : fallait-il rester fidรจles aux idรฉaux de non-violence, ou recourir aux armes ?
ร ce sujet, tranchait avec une citation du Premier ministre indien Jawaharlal Nehru, souvent reprise par les militants : ยซ Je prรฉfรจre la non-violence ร la violence, mais jโaime mieux la libertรฉ par la violence que la non-violence dans lโesclavage. ยป
Pour Pandjock, cette phrase rรฉsume parfaitement le dilemme de son รฉpoque.
En 1957, il รฉlabore mรชme un plan dโassassinats ciblรฉs contre les ยซ valets ยป camerounais du systรจme colonial, considรฉrant que la lutte ne peut รชtre gagnรฉe sans neutraliser les collaborateurs.
La traque coloniale
Cette montรฉe en puissance inquiรจte les autoritรฉs franรงaises. Dans la Sanaga-Maritime, rรฉgion natale de nombreux cadres de lโUPC, lโarmรฉe coloniale lance une vaste offensive.
Les opรฉrations de ratissage, soutenues par des services de renseignement de plus en plus efficaces, visent directement les chefs du CNO.
Isaac Nyobรจ Pandjock devient rapidement une cible prioritaire. Pour les militaires franรงais, lโรฉliminer serait porter un coup dรฉcisif au mouvement. ร partir de 1957, il vit traquรฉ, changeant sans cesse de cachette, mais poursuivant inlassablement son travail dโorganisation.
La fin, dans la forรชt
Le 7 juin 1958, son destin bascule. Ce jour-lร , une patrouille franรงaise lโintercepte dans une forรชt de la Sanaga-Maritime. Pris dans une embuscade, Pandjock est tuรฉ.
Sa mort provoque un choc dans les rangs de lโUPC : le mouvement perd son chef militaire, celui que beaucoup considรฉraient comme le ยซ gรฉnรฉral ยป du maquis.
Pour lโarmรฉe coloniale, cโest une victoire. Dโautant que les soldats saisissent une importante quantitรฉ de documents appartenant au CNO.
Ces papiers rรฉvรจlent lโorganisation interne du maquis, ses rรฉseaux, ses effectifs, ses points de ravitaillement. Ils deviennent une arme prรฉcieuse dans la lutte contre lโinsurrection, permettant dโadapter la stratรฉgie coloniale et dโaccรฉlรฉrer la traque des autres leaders.
Un hรฉritage occultรฉ
Quelques mois plus tard, en septembre 1958, Ruben Um Nyobรจ est assassinรฉ ร son tour. Ces deux morts successives portent un coup presque fatal au mouvement upรฉciste.
Pourtant, si Um Nyobรจ est restรฉ dans la mรฉmoire nationale comme le ยซ Mpodol ยป, le porte-parole du peuple, Isaac Nyobรจ Pandjock est tombรฉ dans lโoubli.
Et pourtant, son rรดle fut crucial : il fut celui qui donna une vรฉritable dimension militaire ร la lutte, celui qui tenta de transformer une rรฉbellion dispersรฉe en armรฉe de libรฉration nationale.
Sa mort, brutale et prรฉmรฉditรฉe, tรฉmoigne de la violence de la rรฉpression coloniale au Cameroun.
Lโoubli est la ruse du diable!
Arol KETCH – 06.09.2025
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