๐๐ ๐๐ฬ๐ญ๐จ๐ง๐ง๐ข๐๐ซ ๐๐จ๐ง๐๐จ ๐๐๐ง๐๐๐ง๐ ๐ฎ๐ ๐๐ฅ๐๐๐ค ๐๐ฌ๐ญ ๐ฆ๐จ๐ซ๐ญ
Nรฉ le 10 aout 1938 ; Maรฎtre Yondo Mandengue Black, รฉminent avocat camerounais et ancien bรขtonnier de lโOrdre, est dรฉcรฉdรฉ ce 16 octobre 2025.
Figure emblรฉmatique du barreau et du combat dรฉmocratique, il restera dans lโhistoire du Cameroun comme lโun des artisans de la lutte pour les libertรฉs et le multipartisme au dรฉbut des annรฉes 1990.
De 1982 ร 1986, il exerรงa la fonction de bรขtonnier des avocats du Cameroun.
Mais cโest surtout son engagement politique courageux, en pleine pรฉriode de parti unique, qui marquera durablement les esprits.
En 1990, dans un contexte de rรฉpression politique, Me Yondo Black, accompagnรฉ notamment dโAnicet Ekanรฉ, Jean-Michel Tekam, Albert Mukong, Vincent Feko, Charles Renรฉ Djon, Francis Kwa Moutome, Rodolphe Bwanga et Gabriel Hamani, rรฉdige un manifeste appelant ร la dรฉmocratie et au multipartisme.
Le document, vite interceptรฉ, conduit ร leur arrestation par la police politique. Tous sont incarcรฉrรฉs au camp de Mboppi, ร Douala.
Depuis sa cellule, Yondo Black adresse une lettre au prรฉsident franรงais Franรงois Mitterrand, dรฉnonรงant leur dรฉtention arbitraire et la dรฉrive autoritaire du rรฉgime camerounais. Il y affirme avoir รฉtรฉ arrรชtรฉ pour avoir simplement voulu crรฉer un parti politique ; une accusation qui plonge le rรฉgime dans lโembarras.
Le 14 mars 1990, le gouvernement publie un communiquรฉ prรฉcisant que les prรฉvenus nโont pas รฉtรฉ arrรชtรฉs pour leur volontรฉ de crรฉer un parti, mais pour ยซ atteinte ร la sรฉcuritรฉ de lโรtat ยป. Le texte annonce รฉgalement quโils seront traduits devant le Tribunal militaire.
ร lโouverture du procรจs, 247 avocats venus de tout le pays envahissent la petite salle du tribunal, entiรจrement noire de robes, pour dรฉfendre Yondo Black et ses compagnons. Dix-neuf dโentre eux prendront la parole, tandis que plusieurs diplomates รฉtrangers assistent aux audiences.
Vรฉritable figure centrale du procรจs, Me Yondo Black dรฉcide de plaider lui-mรชme pour le citoyen Yondo Mandengue Black. Il dรฉclare alors :
ยซ Je considรจre ce jour comme le plus glorieux de ma vie, pour la libertรฉ ! ยป
Dรฉmocrate convaincu, il dรฉnonce lโimposture du rรฉgime de parti unique et rรฉaffirme son attachement au multipartisme garanti par la Constitution.
Prรชt ร subir la prison pour ses convictions, il prophรฉtise que le Cameroun ne sera plus jamais le mรชme aprรจs ce procรจs.
Les plaidoiries des avocats iront toutes dans le mรชme sens : ce procรจs est celui dโun rรฉgime, non celui des accusรฉs.
Les verdicts tombent : Anicet Ekanรฉ est condamnรฉ ร 5 ans de prison ferme pour ยซ subversion et outrage au prรฉsident de la Rรฉpublique ยป ; Jean-Michel Tekam, jugรฉ par contumace, รฉcope รฉgalement de 5 ans ferme ; Yondo Black reรงoit une peine de 3 ans de prison pour ยซ subversion ยป ; Charles-Renรฉ Djon et Rodolphe Bwanga รฉcopent de 2 ans avec sursis ; Henriette Ekwe, Albert Mukong, Gabriel Hamani et Vincent Fekosont acquittรฉs.
Cette affaire marquera un tournant historique : elle ouvre le dรฉbat national sur la dรฉmocratisation et les libertรฉs publiquesau Cameroun.
Quelques mois plus tard, le 15 mai 1990, les fondateurs du Social Democratic Front (SDF) annoncent la crรฉation officielle de leur parti.
Je vous recommande le livre ยซ Les annรฉes Biya ยป du Journaliste Haman Mana qui revient de maniรจre dรฉtaillรฉe sur ce pan de notre Histoire.
Par son courage et son engagement, Maรฎtre Yondo Mandengue Black demeure une figure incontournable de la lutte pour la dรฉmocratie au Cameroun.
Le pays perd en lui un homme de conviction, un patriote et un pionnier de la libertรฉ.
Que la terre de nos ancรชtres lui soit lรฉgรจre.
Lโoubli est la ruse du diable!
Arol KETCH – 16.10.2025
Rat des archives
