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Robert Badinter et son combat pour l’abolition de la peine de mort

La peine de mort est encore appliquée dans plusieurs pays dans le monde, le Cameroun par exemple vient de condamner à mort par fusillade 4 personnes. Ailleurs dans le monde, des Hommes se sont levés pour l’abolition de la peine de mort; c’est par exemple le cas de Robert Badinter en France. Le nom de Robert Badinter restera à jamais associé à l’abolition de la peine de mort en France. Le 21 septembre 1971, Roger Bontems qui purge une peine de prison à la centrale de Clairvaux en France décide d’organiser une prise d’otage avec son compagnon de cellule Claude Buffet, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

Les deux co-détenus s’enferment dans l’infirmerie avec trois otages : le gardien Guy Girardot (25 ans), l’infirmière Nicole Comte (35 ans) et un détenu-infirmier. Les preneurs d’otages tiennent en respect leurs otages avec des couteaux. Ils réclament des armes et des voitures pour s’évader de prison. La prise d’otage va durer toute la journée. La nuit tombée, vers 4h du matin, les forces de l’ordre lancent l’assaut et neutralisent les deux forcenés. Ils découvrent alors dans l’infirmerie, les corps égorgés de deux otages : l’infirmière Nicole Comte, mère de deux enfants, et le gardien Guy Girardot, père d’une petite fille. Les deux forçats sont incarcérés et la date du procès est fixée.Robert Badinter est l’avocat de Roger Bontems lors de ce procès.

Bontems affirme qu’il n’a pas tué et que c’est Claude Buffet qui a exécuté les deux otages. Il avait été établi durant le procès que l’auteur des deux meurtres était effectivement Buffet. Malgré cela, la justice ne reconnaît pas de circonstances atténuantes pour Bontems et les deux preneurs d’ôtage sont condamnés à la peine de mort et guillotinés. L’exécution de Bontems va révolter Badinter; il ne comprend pas le fait qu’une personne qui n’avait pas tué puisse être tuée par la justice. Il décide alors de devenir un partisan déterminé de l’abolition de la peine de mort. C’est notamment pour cette raison qu’il accepte de défendre Patrick Henry.

Patrick Henry est un criminel âgé de 24 ans qui avait enlevé et tué le petit Philippe Bertrand, âgé de sept ans. En effet, celui-ci avait kidnappé ce petit garçon et avait demandé une rançon. À la suite de son arrestation le 17 février 1976, on découvre l’horreur; le corps du petit garçon enveloppé dans une couverture et caché sous le lit. Sa culpabilité ne fait aucun doute, sa condamnation est presque déjà actée. La haine de l’opinion publique est immense. L’opinion est unanime sur la peine de mort. Un journal lance un sondage sur la peine de mort et le résultat est sans appel : 90% des votants sont pour la peine de mort.

Notons que Patrick Henry avait déjà été interpellé une première fois par la police mais faute de preuves et d’aveux, la police l’avait remis en liberté à l’issue de quarante-huit heures de garde à vue. Libéré, il s’était mis à donner des interviews aux médias. Il s’était condamné lui-même lorsqu’il avait menti en public en disant cette phrase dans les médias alors qu’on était encore à la recherche du coupable : “Des assassins comme ça, il faut les condamner à mort”. Peu d’avocats veulent le défendre. Robert Badinter va assurer sa défense aux côtés de Robert Bocquillon.

En accord avec son collègue, Badinter décide de faire de ce procès, un réquisitoire contre la peine de mort. Badinter élabore une stratégie qui vise à faire porter aux jurés la responsabilité d’une éventuelle exécution de Patrick Henry et ça marche. Badinter lâche ceci aux jurés : “Si vous le condamnez à mort, quand vos enfants vous regarderont, ils sauront que vous avez envoyé à la guillotine cet homme et que vous avez choisi pour lui de le faire exécuter.Et vous verrez leur regard. “Patrick Henry échappe à la peine capitale et est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

Après le verdict, il déclare aux jurés : « Vous n’aurez pas à le regretter ».Si le procès a eu une influence sur l’abolition de la peine de mort en France, effective en 1981, il ne coïncide pas avec la fin des exécutions en France puisque deux détenus seront encore condamnées à mort et exécutées avant l’éffectivité de l’abolition de la peine de mort.Proche de François Mitterrand, Robert Badinter devient ministre de la justice de 1981 à 1986. Il profite donc de cette position pour présenter et défendre le projet de loi visant à abolir la peine de mort en France en 1981.

Arol KETCH – 10.09.2021

Rat des archives

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